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« La Petite Dernière » : « Le personnage d’une lesbienne musulmane issue de l’émigration nord-africaine peut aussi représenter l’universel ! »
En mai dernier, en marge du Festival de Cannes où l’adaptation cinématographique éponyme de son autofiction La Petite Dernière était en sélection officielle, l'écrivaine Fatima Daas s'exprimait avec une fierté qui faisait plaisir à voir et à entendre. C'était dans l'émission La Grande Librairie…
On en reproduit ci-dessous l'extrait qui met en valeur le caractère non convenu de l'œuvre :
Augustin Trapenard : « … Au cœur de La Petite Dernière, il y a une réflexion sur la religion. Vous racontez effectivement la difficulté que vous avez eu à concilier votre foi en l’islam et votre homosexualité. Et ce qui est intéressant quand on lit le livre, c’est qu’on comprend que le personnage aurait pu être juive, ou catholique, que l’histoire aurait été presque la même. »
Fatima Daas : « L’histoire que je raconte dans mon livre, c’est vraiment un personnage qui peut représenter beaucoup de personnes. Je veux dire que le personnage d’une lesbienne musulmane issue de l’émigration nord-africaine peut aussi représenter l’universel. »
Augustin Trapenard : « Pour autant, quand le livre est sorti, je me souviens qu’on vous a beaucoup interrogée sur l’islam. On a en quelque sorte focalisé là-dessus. C’est très présent dans le livre évidemment, mais réduire le livre à ça… En quoi avez vous le sentiment qu’en France être une femme musulmane ou de culture musulmane ça revient toujours a être assignée à des catégories, à peut-être se justifier ? »
Fatima Daas : « Je pense que ce qui s’est passé, c’est que le discours que j’avais ne correspondait pas à ce qu’on attendait. Je ne suis pas arrivée en racontant l’histoire d’une jeune lesbienne qui finit par couper les liens avec sa famille. Je raconte l’histoire d’une famille avec qui c’est complexe, mais où il y a beaucoup d’amour, où il y a de la tendresse, et ce n’est pas aussi l’histoire d’un coming-out. Je pense que c’est aussi à cet endroit-là que ça a pu déranger. On attendait quelque chose de différent, quelque chose qui a déjà été dit, qui a déjà été vu, et je pense que je suis encore à côté. Je suis arrivé pour dire mon amour envers ma famille, mon amour envers l’islam, mon amour dans le fait d’être lesbienne et de réconcilier toutes ces identités. De dire j’existe, on existe, car on est nombreuse derrière, et ça ne bougera pas. »
Publiée aux Éditions Noir sur Blanc en 2020, obtenant la même année le Prix Inrockuptibles du Premier Roman, l’autofiction La Petite Dernière est sortie en livre de poche en 2021.
Doublement honorée du Prix d'interprétation féminine pour Nadia Melliti et de la Queer Palm au Festival de Cannes, son adaptation cinématographique de Hafsia Herzi sort en salle ce mercredi. Avec pour introduction ce synopsis : « Fatima, 17 ans, est la petite dernière. Elle vit en banlieue avec ses sœurs, dans une famille joyeuse et aimante. Bonne élève, elle intègre une fac de philosophie à Paris et découvre un tout nouveau monde. Alors que débute sa vie de jeune femme, elle s’émancipe de sa famille et ses traditions. Fatima se met alors à questionner son identité. Comment concilier sa foi avec ses désirs naissants ? », voici la bande-annonce…
Ce film, on l’apprend via plusieurs interviews de la réalisatrice Hafsia Herzi, n’a pas été facile à faire parce que les actrices sollicitées refusaient de jouer une lesbienne. Faut-il en être surpris ? Non. Avec l’extrême-droitisation et l’anti-wokisme toujours plus poussés de nos société occidentale, on imagine que nombre de jeunes actrices préféreront ne pas jouer dans un tel film de peur d’hypothéquer leur avenir. Nadia Melliti, elle, a dit oui ! Et elle a décroché le prix d'interprétation féminine à Cannes !
Interrogé par Konbini sur les films qui ont marqué sa vie, Hafsia Herzi cite notamment le multi-oscarisé Moonlight du réalisateur Barry Jenkins. Un film qu’elle qualifie de « magnifique » par son approche très émouvante « de voir vivre des gens qu’on a pas l’habitude de voir au cinéma ». Magnifique également par « sa sensualité, sa pudeur » et cette « impression que les acteurs sont totalement à l’abandon », à savoir qu’on n’a pas l’impression qu’ils jouent et qu’il y a des caméras. Un film qui l’a beaucoup inspiré dans la réalisation de La Petite Dernière.
Vraiment, on demeure bluffé par Herzi et sa carrière en tant qu’actrice, scénariste et réalisatrice. Et on adhère à 100% au compliment que Robin Campillo lui a adressé dans l’émission C Ce Soir lors de la projection de son film à Cannes :
« Il y a une cohérence incroyable entre son travail d’actrice et son travail de réalisatrice. Elle a crée un personnage et des films qui sont liés ce qu’elle est profondément. Moi, ça me touche parce que c’est une forme d’incarnation de ce qu’elle est en tant qu’actrice. J’ai trouvé le film bouleversant. »
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